Le son délicat de Thunder - Rolling Stone

18/02/2023 Par acomputer 345 Vues

Le son délicat de Thunder - Rolling Stone

Le groupe de hard rock britannique Thunder célèbre ses trente ans d’existence en revisitant son répertoire dans un nouvel album, Please Remain Seated. Accrochez vos ceintures !

Le 21 décembre 2018, Thunder investissait la prestigieuse Roundhouse londonienne afin d’y jouer leur désormais légendaire spectacle de Noël. Cette tradition initiée en 2003 permet au groupe de hard rock d’interpréter chaque année, sauf exception, deux sets acoustiques et électriques, et conclut en beauté une cuvée 2018 fastueuse : Stage, l’album live enregistré en Europe et au Japon, a atteint la première place des charts britanniques, et la formation s’est particulièrement distinguée lors du Download Festival de Donington Park, en juin 2018. Si, en France, Thunder remplit à peine une Maroquinerie, comme ce fut le cas lors de leur dernier passage en avril 2017, le groupe est célèbre, en revanche, au pays du Soleil-Levant et prophète en ses propres contrées, où il a récolté deux disques d’or, quand cela signifiait encore quelque chose, et placé pas moins de 20 singles dans les hit-parades, parmi lesquels les fameux “Love Walked In”, “She’s So Fine” et “A Better Man”.

Thunder s’en sort d’ailleurs remarquablement bien car, au début, c’est peu dire que l’affaire était loin d’être pliée : formé en 1989 par Danny Bowes (chant), Luke Morley (guitare) et Gary James (batterie), tous trois ex-Terraplane, combo pop apprécié par la critique qui atteignit en 1985 la 74e place des charts, le groupe a débarqué au mauvais moment, au mauvais endroit. Au tournant des années 1990, si les Guns N’Roses tiennent encore le haut du pavé, ils seront en effet bientôt dévastés par la tornade Nirvana et la vague grunge qui remisera le hair metal dans le placard à balais. Assimilé à tort aux chevelus peroxydés en raison d’un look qui défiait, même à l’époque, les limites du bon goût (il suffit de regarder le clip de “She’s So Fine” pour s’en convaincre), Thunder sauve néanmoins artistiquement sa peau grâce à son classic rock efficace et d’excellente facture, entre Bad Company, Whitesnake et Aerosmith : voix puissante et rocailleuse, arpèges cristallins et solos au cordeau, compositions bien charpentées souvent empreintes de blues et de soul, production carrée, concerts bouillonnants… Si Thunder n’a pas inventé la “foudre”, force est de lui reconnaître une identité musicale armée et la volonté de ne pas s’endormir sur ses lauriers : “On n’a jamais été le genre de groupe qui compose le même album encore et encore, et on n’a jamais eu peur d’essayer de nouvelles choses. En fait, notre processus créatif au cours des trente dernières années nous a enseigné que nous ne sommes jamais aussi bons que quand nous devons relever un défi”, expliquait récemment le chanteur Danny Bowes. De fait, malgré de nombreuses séparations suivies d’autant de reformations, malgré quelques embrouilles avec différentes maisons de disques qui les ont incités, en 2002, à créer leur propre label, STC Recordings, Thunder fait toujours partie du paysage, comme en atteste la bonne tenue de l’album Rip It Up, commercialisé en 2017, qui a atteint la troisième place des classements UK, leur meilleur score en vingt-deux ans.

Son successeur, à paraître en janvier 2019, le bien nommé Please Remain Seated – qui bénéficie, ô surprise, d’un superbe artwork, ce à quoi Thunder ne nous avait pas vraiment habitués, loin s’en faut –, voit les cinq musiciens revisiter leur catalogue avec entrain, sans complexe et sans tenir compte des querelles de chapelle : “Après avoir réimaginé et réenregistré ‘Love Walked In’ en 2017, nous avons souhaité appliquer le même processus à d’autres chansons. Certains titres ont abouti spontanément, d’autres ont pris une série d’étranges virages à gauche et à droite avant de se retrouver dans un endroit qu’aucun de nous n’aurait pu imaginer.” Un endroit mid-tempo au son délicat, gorgé de toutes les influences qui imprégnaient déjà les morceaux originaux, totalement assumées et mises en avant ici : blues blanc (“Bigger Than Both of Us” et “Empty City”), piano jazzy (“Girl’s Going Out of Her Head”), rythmique reggae (“Fly on the Wall”), réminiscences soul (“Just Another Suicide”), sans oublier “I’m Dreaming Again”, la power ballad de rigueur qui tue !

Le son délicat de Thunder - Rolling Stone

“Please Remain Seated n’est pas censé être un best-of, et ce n’est pas non plus un changement de direction. Il s’agit simplement d’une étape supplémentaire du voyage vers notre destination, quelle qu’elle soit”, conclut Danny Bowes. Restons assis, donc, et voyageons. Attention, un coup de foudre n’est pas à exclure !

Denis Roulleau