Yoshiki : "Je veux que les gens se disent que le kimono peut être mode"

26/03/2022 Par acomputer 584 Vues

Yoshiki : "Je veux que les gens se disent que le kimono peut être mode"

Par Mélody ThomasPartagerEnvoyer par e-mail

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Je certifie ne pas envoyer d'e-mail indésirableVirtuose du piano, batteur de hard rock et aujourd’hui designer mode. L’artiste japonais Yoshiki entend prouver aujourd’hui qu’en mode, comme en musique, les cases sont obsolètes.

Quand on parle de mode, on a souvent tendance à s’arrêter à la mode occidentale. Majoritairement par paresse, mais aussi, parfois, par dédain. Une attitude qui disparaît à l’heure où les tendances s’uniformisent dans tous les pays et où de nombreux designers et influences parviennent à se faire une place sur la scène internationale. C’est dans ce contexte fascinant que Yoshiki, artiste japonais aux mille facettes, décide de relancer sa marque de kimono. Celui qui, après avoir monté le groupe de hard-rock The X Japan, avoir fait ses preuves en tant que pianiste et avoir créé son propre vin, a renoué cette année avec son héritage familiale dans l’idée de prouver que le kimono n’est pas qu’un vestige vestimentaire à ne conjuguer qu’au passé.

Faire tomber les frontières

Son nom vous est peut-être inconnu et pourtant Yoshiki réunit 814k d’abonnés sur son compte Instagram. Un succès que ceux qui s’y connaissent en musique sont loin d’ignorer. Car Yoshiki est celui qui a lancé X Japan, groupe de hard rock phare des années 80/90. En gros, imaginez feu Johnny Hallyday devenu un jour créateur; vous aurez une petite idée de la place que l’artiste occupe dans la culture japonaise. En octobre dernier, c’est lui qui a ouvert la Fashion Week japonaise. Un défilé où mode et musique, tradition et modernité se renvoyaient la balle. Sous son égide, le kimono devient sensuel, parfois provocant sans jamais perdre son sens du détail. « Dans mon défilé, le style dépend de la musique. Habituellement, un designer fait des vêtements et met de la musique sur son défilé, mais pour moi, c’est l’inverse. Pourquoi ne pas avoir un kimono qui correspond à cette musique ? La musique vient d’abord. » , nous expliquait-il en interview. Plus que l’histoire d’un musicien qui fait de la mode, l’histoire de Yoshiki est celle d’un homme qui prouve que le terme "tendance" n’est pas un antonyme de "tradition". "Les gens aiment construire des murs. Construire un mur, c’est se sentir en sécurité. Mais dans l’art, il faut détruire ce genre de mur. Les gens essaient de diviser même dans la musique en classant par genre et sous-genres. La musique c’est de la musique. Les gens ne peuvent pas définir ma musique, on faisait du hard-rock et on s’habillait d’une manière considérée comme féminine. Quand on parle d’art, il n’y a pas de règles pour moi", nous a-t-il confié.

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Repenser le kimono…

"J’ai grandi dans une famille qui vendait des kimonos. Dans la culture japonaise, le fils est sensé reprendre l’entreprises familiale mais je suis devenue un musicien à la place. Je savais qu’un jour, je produirais des kimonos et il y a dix ans, j’ai eu l’envie de manière naturelle, c’est dans mon sang, j’imagine", continue-t-il en nous contant son histoire. Du point de vu occidental, le kimono est souvent perçu comme une pièce traditionnelle et donc pas adaptée à la mode, pour la simple raison que la mode est considérée comme cyclique, faite de tendances et de mutations.

Yoshiki :

C’est contre cette pensée paresseuse que Yoshiki créé des collections qui mêlent savoir-faire du kimono et réinterprétation moderne. : "Je veux préserver le kimono traditionnel, mais j’aime que les choses évoluent. C’est controversé, mais exactement de la même manière dont je fais du rock. J’ai été attaqué de toute part lorsque j’ai commencé… Donc peut-être que dans dix ans, les gens se diront que c’était une bonne idée".

...à l’heure de l’appropriation culturelle

Aujourd’hui, on trouve peu de kimono dans les rues de la capitale japonaise où Yoshiki présente sa collection. C’est surtout Kyoto, tenante traditionnelle du pays qui donne à voir encore des kimonos traditionnels. Dans The Social Life of Kimono, Sheila Cliffe écrit : "Après le boom du vêtement traditionnel un retour au style japonais a pris place dans les mariages, cérémonies universitaires depuis les vingt dernières années". Et on comprend leur attrait tant il est fascinant de voir marcher avec soin des hommes et des femmes dans ces tenues qui nous évoquent – en Occident- une ère que l’on connaît peu si ce n’est par les traductions vestimentaires de designers comme John Galliano ou Thom Browne. Cette année, le kimono a d’ailleurs fait son grand retour sous le feu des médias lorsque Kim Kardashian a du changer le nom de sa ligne de shapewear qu'elle voulait appeler Kimono. Un jeu de mot sur son prénom qui a provoqué énormément de remous au point qu’aujourd’hui un avocat travail à empêcher l’appropriation culturelle de cet élément phare dela culture nippone. Loin de la culotte gainante de Kim K, Yoshiki dribble ces questions et rêve de voir le kimono devenir un objet de culture international respecté. "Je veux que les gens se disent que le kimono peut être mode. Les gens sont traditionnels ou conservateurs dans leur style donc je veux que les gens se disent que le kimono peut être fort. Il peut être rock’n roll. Peut-être que dans 15 ans les gens viendront à des concerts de rock dans des kimonos", sourit-il.

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