"Ne nous oubliez pas" : Darya Parsia, artiste afghane, raconte le cauchemar taliban

16/06/2022 Par acomputer 511 Vues

"Ne nous oubliez pas" : Darya Parsia, artiste afghane, raconte le cauchemar taliban

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Darya Parsia nous a contacté·e·s en privé sur Instagram. Comme on jette une bouteille à la mer. Son message ? Alerter sur le sort de son pays et sur la situation préoccupante des artistes afghanes. Nous avons répondu à son appel. S'en est suivie une série de mails- lorsqu'elle avait la chance d'avoir accès à internet- dans lesquels elle nous a raconté son histoire. Celle d'une enfant de la guerre, d'une ado triste, d'une jeune femme qui voit aujourd'hui son pays replonger dans le chaos.

Darya (il s'agit de son nom d'artiste, elle préfère taire son véritable nom par crainte de représailles) est née au Pakistan il y a 22 ans lors d'un "jour glacial", nous confie-t-elle. Ses parents étaient "différents". Des réfugiés afghans, issus de la minorité chiite. Le père de Darya avait une petite échoppe, sa mère était institutrice. Mais ils ont dû fuir l'Afghanistan en 1996, quelques jours après l'irruption des talibans dans la capitale, Kaboul.

Comment décrire cette enfance exilée ? "Sombre", tranche Darya. Elle, la gamine curieuse et créative, se rappelle du toit rouillé et vétuste de son école, des profs "méchants", des coups de ses frères, des choses dont elle rêvait mais qu'on lui interdisait, des hibiscus du jardin de l'école qui l'apaisaient, de l'injustice. "Je n'ai jamais accepté le traitement des filles et des femmes. J'ai constamment été opposée au fait que les filles et les femmes étaient tenues d'effectuer toutes les tâches ménagères pour les hommes, cuisiner nettoyer, laver, leur apporter un verre d'eau. Et pourquoi ai-je été forcée par mes frères de me couvrir la tête d'un foulard à l'âge de cinq ans ? Je ne voulais pas porter ce foulard", se rappelle-t-elle.

"J'ai eu une enfance triste où écouter de la musique, être heureuse et danser était considéré comme 'haram', illégal, tabou. Nous avons été endoctrinées pour accepter notre destin et mener une vie ascétique en tant que femmes."

Alors qu'elle a 10 ans, sa famille décide de repartir en Afghanistan. Les talibans ont été délogés du pouvoir depuis 2001, le pays semble renaître après le chaos. Mais sur place, la jeune Chiite s'isole par crainte d'être agressée par ses camarades, en grande majorité sunnites. Son échappatoire ? Les livres pour enfants qu'elle emprunte avec gourmandise à la petite bibliothèque à côté de sa maison. "Je me mettais à la place des personnages et devenais leur compagne de voyage. J'avais un monde charmant dans ma tête, un monde où il n'y avait pas de guerre et de cruauté."