Environnement : le tote bag file un mauvais coton Des milliers de litres d’eau et des pesticides Aucun «goodies utiles»

25/07/2022 Par acomputer 468 Vues

Environnement : le tote bag file un mauvais coton Des milliers de litres d’eau et des pesticides Aucun «goodies utiles»

On en a tellement amassé des tote bags, qu’on ne les compte plus. Enfin si, en essayant d’estimer leur nombre, on en recense à la louche une trentaine rangés en boule dans un plus grand. Et, noirs ou écrus, imprimés, à message ou unis, ils ont pour leur grande majorité été offerts lors d’un festival, dans une boutique de fringues ou comme cadeau pour notre participation au financement d’un nouveau média (véridique). Bref, les années passent et on accumule toujours plus de sacs en coton, pensant faire un geste somme toute banal pour limiter la pollution plastique.

Serait-ce une erreur d’appréciation ? C’est ce que laisse penser le New York Times dans un article publié mardi. En effet, le grand quotidien américain se paye à son tour (cinq ans après The Atlantic) le tote bag – de tote pour «trimballer» en anglais –, sac en toile réutilisable aux fausses apparences écolos. Depuis une quinzaine d’années, les descendants des Jutebeutel (sacs en toile de jute prisés des Allemands à la fin des années 70) ont été généralisés comme alternative au sac à usage unique. Or, le coût environnemental et social nécessaire à la production de ces «totems de notre époque» (dixit le Monde) est loin d’être négligeable et ils sont devenus des supports publicitaires à part entière, quitte à inciter paradoxalement à la (sur) consommation.

Plusieurs études d’impact soutiennent ces allégations. En 2006 par exemple, l’agence environnementale britannique montrait, fort contre-intuitivement, que la performance écologique (en particulier, l’empreinte carbone) des sacs en tissu n’était pas meilleure que celle des sacs en plastique. Pour faire mieux que les sacs en polyéthylène utilisés une seule fois, les tote bags devaient être réutilisés au moins 130 fois. Pire : selon un autre rapport paru en 2018, cette fois du ministère de l’Environnement et de l’Alimentation danois, ils doivent l’être plusieurs milliers de fois (de 7 000 pour un sac en toile conventionnel à 20 000 pour un sac en coton biologique). Soit une vingtaine d’années minimum pour un usage au quotidien, la faute à une matière première textile très gourmande en eau (plusieurs milliers de litres pour la production d’1 kilo) et en pesticides.

Environnement : le tote bag file un mauvais coton Des milliers de litres d’eau et des pesticides Aucun «goodies utiles»

On est donc très loin de l’objet écoresponsable désormais promu par les petits designers comme les géants de la fast-fashion, par ailleurs peu regardants sur les conditions de travail dans les champs de coton des principaux exportateurs comme la Chine. «Chaque nouveau sac neuf en coton a un coût de production qui implique un impact environnemental négatif, soutient, elle aussi, Eloïse Moigno, directrice du label de mode SloWeAre. Et quand c’est du coton bio, il n’y en a pas suffisamment par rapport à la demande. Il serait préférable d’utiliser cette ressource pour fabriquer des habits proches du corps, comme des sous-vêtements.»

De là à plaider pour le retour du bon vieux sac plastique, bannis des rayons des supermarchés depuis 2017 ? Pas vraiment, compte tenu de leurs conséquences environnementales désastreuses pour les océans. En revanche, un meilleur usage des sacs réutilisables déjà dans nos placards semble une solution de compromis. Bien souvent, ces derniers ne servent que quelques dizaines de fois avant de finir à la poubelle (et d’être incinérés puisque les logos sérigraphiés en PVC ne sont pas biodégradables). Autre recommandation, de Zero Waste France, aux professionnels cette fois : n’en distribuez plus gratuitement car il n’existe aucun «goodies utiles».

L’association, qui promeut la réduction drastique des déchets, propose plutôt de mettre en place en boutique des points d’apport ou de mise en libre-service de sacs de seconde main pour les clients qui auraient oublié le leur. «En voulant résoudre la question des sacs plastiques en caisse, on a créé un nouveau problème. Il faut donc que les marques évitent le surpackaging, même si elles se privent d’un message publicitaire», conclut Eloïse Moigno. Dernière option, pour les créateurs soucieux de leur empreinte environnementale : il est toujours possible de fabriquer des sacs avec de la matière textile récupérée.