Chute du mur de Berlin : Sarkozy s’est trompé d’une semaine

15/02/2023 Par acomputer 437 Vues

Chute du mur de Berlin : Sarkozy s’est trompé d’une semaine

Sarkozy : J’étais à Berlin le 9 novembre 1989

Chute du mur de Berlin : Sarkozy s’est trompé d’une semaine Chute du mur de Berlin : Sarkozy s’est trompé d’une semaine

Nicolas Sarkozy a bien visité Berlin après la chute du Mur, mais le 16 novembre 1989, et non le soir même, comme il l’a affirmé sur sa page Facebook

Ce qu’il a dit.

Sur sa page Facebook, le président de la République a publié, dimanche, un message affirmant qu’il était à Berlin, le 9 novembre au soir, au moment de la chute du Mur. « Le 9 novembre au matin, nous nous intéressons aux informations qui arrivent de Berlin, et semblent annoncer du changement dans la capitale divisée de l’Allemagne. Nous décidons de quitter Paris avec Alain Juppé pour participer à l’événement qui se profile. Arrivés à Berlin ouest, nous filons vers la porte de Brandebourg où une foule enthousiaste s’est déjà amassée à l’annonce de l’ouverture probable du mur. »

Pourquoi c’est faux.

1 – Le voyage a bien eu lieu… mais le 16 novembre.

Sur la photo, aux côtés de Nicolas Sarkozy, l’ex député RPR Jean-Jacques de Peretti m’a, dans un premier temps, confirmé la version du président. « Il était bien à Berlin le 9 novembre 1989. ». Problème : une dépêche AFP, datée du 17 novembre 1989 et retrouvée par la documentation du Monde, évoque un voyage de Nicolas Sarkozy, Alain Juppé et Jean-Jacques de Peretti à Berlin le 16 novembre 1989. Contacté de nouveau, M. de Peretti, embêté, confirme qu’« il n’a pas été à Berlin deux fois », et que « si l’AFP dit que c’était le 16, c’est que ça doit être vrai ». « Je vais revérifier tout ça », assure-t-il. Une date confirmée par deux ouvrages : une biographie d’Alain Juppé, Le Joker, retrouvée par Le Figaro.fr et La tentation de Venise, un ouvrage écrit par Juppé lui-même, dont Vincent m’a envoyé des extraits.

2 – Le récit est incohérent

Chute du mur de Berlin : Sarkozy s’est trompé d’une semaine

Pour de nombreux observateurs de l’époque (dont le journaliste de Libération Alain Auffray sur son blog) mais aussi plusieurs internautes français et allemands, circuler d’Ouest en Est à Berlin le soir du 9 novembre n’était pas « très facile », comme le racontent deux témoins de la scène, Jean-Jacques de Peretti et Philippe Martel, alors directeur de cabinet de Juppé, et organisateur du voyage. Or, les versions d’Alain Juppé, Philippe Martel et Jean-Jacques de Peretti racontent des scènes qui ressemblent plus à des scènes du 10 ou du 11 novembre. « Je me rappelle d’une Berlinoise en vélo qui faisait sans cesse des allers-retours etre l’Est et l’Ouest », raconte de Peretti. « On est allés à l’Est, nous on pouvait passer, ce n’était pas un problème », assure Martel.

Tous trois racontent une anecdote : une conversation avec un soldat est-allemand pressé de passer à l’Ouest. Mais Juppé et Martel assure qu’une famille allemande leur a prêté des piolets pour détruire le mur. Alors que Peretti se souvient plutôt d’un matériel prêté par le responsable du RPR en Allemagne. Mais un internaute présent à Berlin, Henri Michel, assure que ce matériel n’a fait son apparition dans la ville qu’à partir du 13 décembre.

Surtout, la version de Sarkozy affirmant avoir attaqué le mur du côté Est ne tient pas : la photo, comme l’ont souligné plusieurs internautes, a évidemment été prise côté Ouest. Une information confirmée par Jean-Jacques de Peretti.

Ce dernier, tout comme Philippe Martel, affirment par ailleurs avoir croisé sur place Alain Madelin, alors député UDF d’Ile-et-Villaine. Or une vidéode TF1 de l’époque, diffusée sur LCI.fr, montre Alain Juppé et Nicolas Sarkozy en compagnie d’Alain Madelin le soir du 16 novembre.

3 – La curieuse journée d’Alain Juppé : de Colombey à Berlin en 24 heures ?

Une des principales failles de l’histoire vient du récit que fait Alain Juppé de cette journée. Après avoir mentionné la date du 10 ou du 11 novembre, il a ensuite modifié son blog pour évoquer « le 9 au soir, ou quelques jours plus tard ». Sur Libé Lyon , il évoque le 10 novembre. Problème : dans sa biographie Le Joker (retrouvée par Lefigaro.fr) et dans son livre La Tentation de Venise, retrouvé par Vincent, c’est la date du 16 novembre qui est évoquée.

Joint par l’AFP, le maire de Bordeaux a indiqué qu’il ne se souvenait plus précisément de la date.

Surtout, Le Figaro a retrouvé dans ses archivesla présence de l’ancien premier ministre à la commémoration du 19e anniversaire de la mort du général de Gaulle, le même jour. Le matin à Colombey-les-deux-Eglises, le soir à Berlin ? Pourquoi pas, mais le fait qu’il n’y fasse aucune référence dans ses témoignages de l’époque est étonnant. Célébrer le général et la chute du Mur le même jour aurait sûrement marqué la mémoire d’un gaulliste historique.

4 – L’absence de toute référence, en vingt ans de vie politique

J’ai consulté une quinzaine de biographies de Nicolas Sarkozy, la documentation du Monde n’a rien trouvé dans les archives, celle du Figaro non plus. Arnaud Leparmentier, qui suit l’Elysée pour Le Monde, n’a jamais entendu Sarkozy évoquer cette période. Interrogé sur la polémique, le président n’a pas souhaité répondre.

Merci aux nombreux internautes qui ont contribué à cette enquête !

Nabil Wakim

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