En images. Seine-et-Marne. Trafics de stupéfiants : le sinistre envers du décor

22/08/2022 Par acomputer 419 Vues

En images. Seine-et-Marne. Trafics de stupéfiants : le sinistre envers du décor

Point de vente de drogues, le square de Lorient, à Melun, est souvent ciblé par la police. Si la tour doit être démolie, ce sont les habitants qui payent le plus lourd tribut.

Par Julien Van Caeyseele Publié leLa République de Seine et MarneVoir mon actu

« Attention, où vous mettez les pieds », prévient l’agent de la société de nettoyage. Au sol, des flaques d’urines et des excréments sont présents à tous les étages. « Il y en a même qui étalent ça sur les murs, on dirait que c’est juste pour faire chier le monde… »

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Une opération de « nettoyage » a été diligentée par le bailleur, Habitat 77, au sein de la tour du 13 square de Lorient, dans le quartier Montaigu, à Melun. L’intervention, encadrée par des policiers du GSP (Groupe de sécurité de proximité) de Melun Val de Seine, s’est déroulée, mercredi 24 mars, au lendemain d’une opération de sécurisation.

« C’est un cercle vicieux »

« Portes, canapé, fauteuil : l’objectif est de retirer tous les encombrants que les dealers ramènent pour bloquer les accès aux étages, précise un des gestionnaires d’Habitat 77. Ils vont jusqu’à dégonder les gaines techniques pour gêner les policiers. »

Mais au milieu de tout ça, ce sont les habitants qui trinquent. Certains ont même laissé des messages aux trafiquants, affichés sur les murs dans les escaliers : « Arrêtez de chier et de pisser ici ». Il faut dire que les vendeurs en laissent eux aussi.

Dès le hall d’entrée, les tags annoncent le point de vente et le compte Snapchat qui permet de contacter les dealers. Résine de cannabis, herbe et cocaïne : les produits en vente sont affichés sur les murs, accompagnés de messages à destination des policiers.

En quelques heures, la société de nettoyage a rempli l’arrière d’une camionnette : autant de mobiliers qui n’encombreront plus les escaliers… Au moins jusqu’à la prochaine installation et le retour des dealers qui reviennent toujours…

Fouille méthodique

En images. Seine-et-Marne. Trafics de stupéfiants : le sinistre envers du décor

« C’est bien de nettoyer, mais ça ne sert à rien, se désole d’ailleurs une habitante. Dès que la police aura mis les voiles, ils seront de retour, c’est un cercle vicieux. » Parallèlement au nettoyage, les policiers examinent minutieusement tous les coins et cachettes possibles.

Dans une des gaines techniques, l’une des fonctionnaires met la main sur une pochette contenant des sachets d’herbe. La veille, l’immeuble avait déjà été fouillé, notamment avec l’aide d’un chien spécialisé.

« Dès que vous partez, il sont de retour… »

Dans les étages, un habitant ouvre sa porte à cause du remue-ménage, lié à la fouille méthodique. Devant lui, un policier. Mais l’homme ne semble pas surpris de ce face-à-face matinal. « C’est encore vous, lance-t-il, impavide. De toute façon, dès que vous partez, cinq minutes, après ils sont de retour. »

La scène est connue et semblable à tous les points de vente : des guetteurs qui hurlent « ça passe » dès que des policiers s’approchent de l’immeuble. « Puis ils filent se cacher et reviennent juste après », rabâche-t-il. Du côté du bailleur Habitat 77, on évoque un travail de Sisyphe et toujours sous protection policière.

« On a beau nettoyer les halls et tout retirer, ils reviennent systématiquement, concède Denis Jullemier, le président d’Habitat 77. On a arrêté d’installer de nouveaux habitants dans cette tour qui est gangrenée par les trafics, mais on ne peut pas laisser ceux qui y habitent sans rien faire pour eux. »

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Le sentiment d’abandon est toutefois prégnant chez les habitants. Si la tour fait partie des sites qui seront démolis dans le cadre du nouveau programme de rénovation urbaine sa démolition – contrairement à d’autres immeubles visés comme Schuman et Chateaubriand – ne souffre d’aucune contestation.

« C’est l’une des premières opérations de démolition que nous mettrons en place », promet-il, évoquant une échéance d’ici 2023 ou 2024. De leur côté, les policiers continuent leur progression.

Dans une gaine, ils découvrent une balance de précision, utilisée pour peser les quantités de drogue. Au 11e étage, un homme est installé sur le palier, allongé sur un matelas, le visage caché sous une couverture.

« Harcèlement permanent »

« Pourquoi vous dormez-ici ? », lance le policier. Mais l’homme assoupi n’est pas un dealer. « Je suis actuellement sans-abri, je suis venu ici pour dormir », répond-il, mi-endormi, mi-gêné. Le fonctionnaire lui conseille de se diriger vers un foyer du centre-ville. Il ramasse ses affaires et part sans demander son reste.

Arrivé au dernier étage, les policiers vérifient même la trappe pour accéder au toit de l’immeuble. « Certains n’hésitent pas à s’y cacher », se souvient un policier. Cette fois, les recherches n’aboutiront pas.

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« C’est un travail de harcèlement permanent, justifie Samuel Fy, commissaire en charge du service de voie publique à l’agglomération Melun Val de Seine. Nos opérations – qu’elles soient visibles ou non – sont destinées à veiller à la tranquillité des habitants, que ce soit ici, ou dans d’autres points de vente comme le 17, avenue du Maréchal-Juin, à l’Almont. »

Des verbalisations pour les clients

Des répits parfois de courte durée pour les habitants, au gré des interventions de police. Outre les dealers, les policiers visent aussi les clients qui, indirectement, maintiennent les conditions de vie difficile des habitants. Ainsi, les forces de l’ordre multiplient les verbalisations à 200 €, du montant de l’amende forfaitaire délictuelle.

« Une manière de les dissuader de venir », poursuit-il. « On gêne les trafiquants, mais c’est un travail de perpétuel recommencement », conclut Samuel Fy. Surnommée tour de Papel par les dealers – en référence à la série Casa de Papel -, elle est surtout vue comme une tour infernale pour les habitants.

C’est d’ailleurs là qu’un individu avait tenté de scier à la disqueuse, le mât d’une caméra de vidéosurveillance, trop gênante pour les trafics. Une scène filmée en pleine journée et diffusée sur les réseaux sociaux. Et toujours avec les riverains en première ligne.

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