Skims x Fendi : la mode de l’intime post-confinement
Triangulation entre lingerie, party dress et pyjama d’intérieur, la collection imaginée par Kim Jones et Kim Kardashian West est une ode à la photogénie de l’intime.
Les rumeurs étaient donc vraies. Kim Kardashian, reine du vêtement gainant avec sa marque Skims, et Kim Jones à la tête de Fendi et icône du luxe 4.0, fusionnent le temps d’une collection. Le résultat ? Un legging velouté, une robe tube ductile, un collant vaporeux, le tout entièrement logotypé, et porté par un casting inclusif aux attitudes barbiesque dans un décor lénitif. Alliant loungewear chamallow et vestiaire de cocktail nude, cette garde-robe s’augmente d’une relecture du it-bag baquette Chain de Fendi.
Prévue pour le 9 novembre, la collection est déjà saluée par le Wall Street Journal qui couronne le duo surréel du titre d’innovateur de l’année. “Nous partageons le désir de repousser les frontières”, a lancé Kim Kardashian.
Intime, public, dessous, dessus, réalité et fiction… L’ex-star de téléréalité transgresse les limites et remanie avec ce cobranding luxe le sens et la fonction même des vestiaires. Ici le vêtement caché devient parure, et le loungewear prend une esthétique de vêtement du soir. Là, les pièces sculptent les corps pour la vie IRL, racontant un rapport à l’apparence transformé par les pandémies à répétition, et un luxe plongeant dans les métaverses.
“Kim Kardashian est une icône transhumaniste, car elle vit et existe sur la frontière numérique. Elle est emblématique du passage vers la technologie des médias sociaux”, explique la chercheuse Sarah Marilyn Barrick pour qui Kardashian est un véritable indicateur.
Si Kim revendique une union autour de l’éthos de l’inclusivité (la capsule propose une large gamme de taille), est-ce pour habiller les corps IRL, ou couvrir notre chair de pixel ?
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Hacking de l’intimité
Si la capsule est bien réelle, conçue dans des matières innovantes, elle puise dans le passé immédiat de la culture visuelle du confinement. Culotte taille haute, brassière transparente : Skims x Fendi détourne une lingerie confort –simultanément intime et domestique – en parure de luxe, et s’inscrit dans les tendances de l’été 2022. Chez Dior, les soutiens-gorge sont portés avec un léger bermuda façon boxe, s’imposent par-dessus des t-shirts chez Isabel Marant, et se déconstruisent façon néon pour des raves post-covid chez Ottolinger.
Détournées et stylisées, ces pièces se réfèrent à un corps privé, mis en scène encore et encore chez les influenceuses confinées. En effet, les règles de la présence digitale évoluent en 2020 lors du Covid-19 – et Kardashian prend les devants aujourd’hui en faisant de ce nouveau confort la base de son marketing avec Fendi.
Shapewear et pyjamas peau de pêche suspendus au milieu d’un mur blanc cassé : c’est dans ce décor à la fois privé et impersonnel que sont lancées ces collections d’emblée sold-out. Ses stories journalières ponctuées d’essayages et de conseils pour les internautes, correspondent à la notion d’extimité décrite par le psychiatre Serge Tisseron. Caractéristique des réseaux sociaux, cet opposé de l’intimité correspond au désir de montrer une partie de sa vie intime, autant physique que psychique “afin de mieux se l’approprier grâce aux échanges suscités avec les proches”, écrit-il.
Ainsi, dans les interstices des réseaux, ces vêtements ne sont pas synonymes de dévoilement, mais de construction. Avec Skims x Fendi, nos corps virtuels deviennent réels, mais toujours prêts à une photogénie 3.0.